Parashat Pinhas

בס”ב

Parashat Pinhas – פרשת פינחס
Bamidbar chapitres 25 à 30

On se souvient (fin de Balak, parasha précédente) que les filles de Moav réussirent à entrainer les Bnei-Israël dans la débauche et l’idolâtrie. Cet épisode arrive à son paroxysme lorsqu’un prince d’Israël s’accouple au su de tout le monde, avec une midianite, et que le couple est transpercé par Pinhas « fils d’Elazar, fils d’Aharon HaKohen ».
Grace à cet acte, l’épidémie qui avait commencé à décimer le peuple, s’arrête, laissant sur le carreau 24000 morts.
La parasha Pinhas commence par une déclaration qu’Hashem fait à Moshé :
פינחס בן אלעזר בן אהרון הכהן השיב את חמתי מעל בני ישראל…
לכן אמר הנני נתן לו את בריתי שלום…
“Pinhas fils d’Elazar, fils d’Aharon le prêtre a détourné ma colère de dessus les enfants d’Israël…
C’est pourquoi tu annonceras que je lui accorde mon alliance de paix… »
והיתה לו ולזרעו אחריו ברית כהנת עלם תחת אשר קנא לאלהיו ויכפר על בני ישראל
« Et elle sera pour lui et sa descendance après lui, une alliance de prêtrise eternelle pour avoir agi avec zèle pour son Dieu, et obtenu le pardon pour les enfants d’Israël ».
Un acte violent récompensé par une alliance de paix. 
L’action commise par Pinhas était certainement nécessaire. Elle a en tous cas calmé le courroux divin et arrêté le carnage. Pinhas méritait certainement les plus hautes récompenses. Mais pourquoi précisément le couronner d’une « alliance de paix » ?

Un général rentrant victorieux de la guerre, recevra la croix de guerre, la légion d’honneur, le bâton de maréchal, que sais-je ? Mais certainement pas le prix Nobel de la paix.
La violence, le meurtre ou la vengeance, sont à l’oppose du Shalom qui évoque lui, l’amour du prochain, la compréhension ou le compromis.
Comment comprendre cette bénédiction accordée à Pinhas ?
Nous avons essayé l’année dernière d’apporter quelques éléments de réponse à cette difficile question.

הוא פנחס הוא אליהו
De nombreux midrashim identifient Pinhas le zélote, et le prophète Eliahou, un autre grand zélote, qui a vécu quelques cinq siècles plus tard.
Cette identification s’exprime par les mots prononcés par Reish Lakish : « Pinhas est Eliahou ». En quelque sorte, le zèle dont a fait preuve Pinhas, lui a valu de se manifester des siècles plus tard, sous les traits d’Eliahou le zélote.
L’origine de cette tradition se trouve certainement dans leur trait commun, le zèle « sacré ».
A priori, leurs actes se ressemblent. Pinhas fait preuve de zéle pour Hashem en tuant Zimri ben Salou, pour l’acte public de profanation qu’il a commis. Tandis qu’Eliahou a passé au fil de l’épée des centaines de prophètes (juifs) de Baal et Ashéra.
Cependant cette identification n’empêche pas des différences.
A propos de Pinhas, Dieu dit clairement : בקנאו את קנאתי « en agissant avec beaucoup de zèle pour moi” (mot à mot: en zélant mon zèle).
Eliahou Hanavi (Rois 1, 19/10) plaide pour lui-même : קנא קנאתי לה” צבאות « j’ai agi avec beaucoup de zèle pour l’Eternel ».
Après l’acte de Pinhas, Hashem lui accorde une alliance de paix, et pour lui et sa descendance, כהונת עולם « une prêtrise perpétuelle ». En d’autres termes, Pinhas est confirmé dans sa function sacerdotale.
Tandis qu’Eliahou, se voit annoncer par une voix divine, la fin de sa fonction, qu’il devra transmettre à Elisha.

Une simple lecture de ce chapitre des Rois, notre Haftara de Shabbat Pinhas, permet d’approcher les raisons de ce « limogeage ».
Apres l’exécution des prêtres idolâtres, la reine Jezebel menace Eliahou de le tuer. Il prend la fuite, arrive à Horev, et entre dans une grotte pour y passer la nuit.
Dieu lui demande ce qu’il fait là, et Eliahou répond :
« J’ai agi avec zèle pour toi Eternel…car les enfants d’Israël ont délaissé ton alliance, renversé tes autels et massacré tes prophètes… ».
Eliahou porte contre l’ensemble du peuple une accusation terrible pour justifier son action. Il semble plaider pour lui-même, alors que dans le cas de Pinhas, les louanges sont prononcées par Hashem.
Un autre grand prophète, le plus grand, Moshé rabbeinou, n’est pas entré en Eretz Israël, pour avoir, selon certains commentateurs, traité le peuple de « rebelles » face au rocher, dans un accès de colère.
Revenons à Eliahou. La voix divine lui ordonne de sortir de la grotte « pour voir apparaitre l’Eternel ».
Un vent puissant « brisant les rochers » se lève, mais Dieu n’y était pas.
Un tremblement de terre se produit, Dieu n’y est pas non plus.
Un feu apparait, Dieu n’y est pas.
Et après le feu קול דממה דקה « une voix douce et faible » se fait entendre.

Cette voix lui demande ce qu’il fait là, et Eliahou reprend la même plaidoirie que précédemment.
Et l’Eternel lui dit « va….et consacre Elisha comme prophète pour te succéder ».
La scène à laquelle il fut donné à Eliahou d’assister devant la grotte portait-elle un message, que celui-ci n’a pas su ou pu saisir ?
Dieu n’est pas dans les éléments qui expriment la colère, l’accusation, et la rigueur, Midat Hadin. Il est dans la voix qui console, qui rapproche.
Dans de telles dispositions, Eliahou ne pouvait poursuivre sa mission de prophète parmi les enfants d’Israël, et devait céder la place.
Mais comme Pinhas, il a bénéficié d’une « alliance de paix éternelle ». Il continuera d’être évoqué durant la Havdala et le Seder de Pessah, d’assister aux circoncisions, et « avant le jour grand et redoutable, ramènera le cœur des pères vers les fils et le cœur des fils vers leurs pères ».
Shabbat Shalom

Dvar Charles et Herve JUDAISME