Parashat Va’ethanan

Parashat Va’ethanan

בס”ד

Parashat Va’ethanan – פרשת ואתחנן
Devarim chapitres 3 à 7

 

Le Houmash Devarim est constitué du “dernier discours” de Moshé Rabbeinou.

Celui-ci n’entrera pas en Eretz Israël avec le peuple qu’il a fait sortir d’Egypte.

Il fait une dernière tentative pour obtenir l’annulation du décret divin.

Moshe implore Hashem…ou plus exactement, il raconte qu’il implora Hashem :

ואתחנן אל-ה” בעת ההיא לאמר…

…אעברה-נא ואראה את הארץ הטובה אשר בעבר הירדן…

ויתעבר ה” בי למענכם

« J’implorai l’Eternel en ce temps là, en disant…

Laisse-moi passer de grâce, que je voie le bon pays qui est au-delà du Jourdain…

Mais l’Eternel était irrité contre moi à cause de vous… »

 

J’ai volontairement mis en gras certains mots de ce début de parasha.

Tout d’abord, la racine ע..ב..ר….

Puis le mot למענכם que tout le monde traduit par “à cause de vous”. En général, למען signifie « en faveur de », c’est un terme positif, en contradiction avec le contexte. Pour faire court, la sanction qui frappe Moshé, est bénéfique à long terme, pour les Bnei Israël.

Revenons à la racine עבר.

De façon étonnante, la racine עבר tinte dans nos oreilles au début de cette parasha. Dieu ne se contente pas de s’irriter contre Moshé, il lui confirme כי לא תעבור « que tu ne traverseras pas le Jourdain »… כי הוא יעבור  « que c’est Josué qui le traversera…).

Sous la conduite du rav Rivlin, nous allons essayer de voir un peu plus clair dans ces redondances de la racine עבר.

La signification de base du mot et du verbe est l’action de franchir une limite matérielle ou imaginaire pour se rendre d’un lieu à un autre. De là, tous les mots impliquant ce passage tels que לעבור (passer), מעבר (passage) et Ever ou Meever (au-delà). Des mots que nous retrouvons sous des formes diverses dans notre texte.

Mais nous y trouvons aussi le verbe ויתעבר Vaytaaber (il s’irrita), qui exprime la colère, en Hébreu כעס, רוגז, חימה et עברה (Evra).

Existe-t-il un lien entre אעברה (je passerai, je traverserai), et ויתעבר (il s’irrita) ?

Mieux : y a-t-il un lien entre ces deux termes, et des mots aussi divers (mais possédant la même racine) que le עובר (le fœtus dans le ventre de sa mère), le עבר  (Avar, le temps passé) ?

Et quel rapport entre tous ces mots et עברית (la langue hébraïque), Avéra (une transgression), ou une année bissextile (מעוברת), ou עבור הארץ (la récolte de la terre).

La signification élémentaire, comme on l’a dit plus haut, est le passage à un autre domaine, à un lieu différent de celui où l’on se trouvait précédemment. On a dit d’Avram “העברי” dans le Midrash Rabba: כל העולם מעבר אחד, והוא מעבר אחד “le monde entier était d’un côté, et lui était d’un autre côté”, ce à quoi Rashi ajoute : שבא מעבר הנהר « qui est venu de l’autre côté du fleuve ».

De là apprend-on que la racine Avar, désigne un changement de lieu, et un changement dans le temps, car quelqu’un qui a changé de lieu (עבר), se trouvait dans le passé (בעבר) dans un autre lieu. Et le fait qu’il se trouve maintenant ici, montre qu’il a changé de lieu, et de temps (עבר).

A propos de la récolte (עיבור), peut-être fait-on allusion au fait que la récolte apporte un supplément de vie (et de poids) aux humains. De même, celui qui עובר passe d’un lieu à un autre, élargit son espace d’existence.

מעוברת c’est la femme qui porte en elle un supplément de vie, de עיבור. Et son עיבור à elle, sa “récolte”, c’est son עובר  , son fœtus.

De là, l’année bissextile, qui porte en elle un mois supplémentaire, est appelée שנה מעוברת.

Si la racine עבר évoque un supplément d’espace  (passage d’un lieu à un autre), ou de temps (le présent s’ajoute au passé), on peut tenter de comprendre le lien entre cette racine, et la colère, l’irritation, le courroux (ויתעבר). Car lorsqu’un homme est en colère, il “enfle” et se remplit d’air.

Dans les textes, utilisant un langage et une image humains, on « voit » la colère divine, sous l’aspect d’un souffle sortant des narines : וברוח אפיך נערמו מים « par le souffle de tes narines les eaux ont été amoncelées ».

L’homme en colère fulmine,  s’échauffe, se remplit d’air, explose, ses narines crachent de l’air. Le corps se dilate. Cette colère s’appelle Evra עברה.

Le lien entre le עובר (le fœtus), et ויתעבר (la colère), est expliqué par le rav Rivlin sous l’angle du Moussar, de la morale.

Le עובר nous enseigne que la vie jaillit de la souffrance et de la douleur, représentés par les douleurs de l’accouchement. Mais ces douleurs ont un but. Même si le chemin est douloureux, le résultat adoucit la souffrance endurée.

Il en va de même pour ce qui concerne la colère et les sanctions divines. Leur but est de faire émerger un homme capable de se remettre en question, et de corriger ses comportements et son éthique, ses Midot.

Shabbat Shalom.

 

 

 

 

Dvar Charles et Herve JUDAISME